De Babylone à Sion

Assis sur les quais d’la gare de Babylone [Couplet 1] Yo! J’ai embarqué en vrac dans un train d’vie qu’j’ai pas choisi Le choix étant réduit, trop peu d’options, j’me suis dit "vas-y" Donc j’ai saisi le micro pour dénoncer nos maux avec les mots Qui soulagent les frères comme une anesthésie Problème, quand les mêmes mots sèment le pire Comme chez le maître qui apprend que son esclave sait lire Réfléchir, s’affranchir, ne plus fléchir le genou À part pour prier ou ramasser son pain, beaucoup Ont perdu leurs vies pour être libres Donc j’me faufile entre les manteaux comme un livre Comme un gun, très peu l’temps d’être jeune L’ignorance est mère de mort sur la route que j’ai dû suivre Oui, j’ai rencontré des gens sur le quai On avait pas d’ticket, on s’est promis d’ramener l’rap au sommet Les hardcore montent, les sociaux montent, les lovers, les funky montent Et dans c’train, les suckers n’avaient pas honte Tous dans l’même wagon, tous partent mais tous les départs n’ont pas la même Destination [Interlude] Le train 2003 à destination de Sion partira voie 27 Veuillez composter vos titres de transport avant de monter en voiture Merci [Refrain (*2)] Clandestin, comme un clandestin Je sais où j’vais mais j’y vais avec l’instinct L’destin, j’y crois pas car ici c’est restreint Si t’as pas l’esprit, on va t’virer du train [Couplet 2] Deuxième arrêt, on dit qu’le rap est mort c’est pas vrai C’est juste qu’à l’oreille mal éduquée l’imposteur apparaît Qui représente qui, qui représente quoi Les MC n’ont pas les mêmes buts tant qu’les intérêts se heurtent Mais la vérité n’a qu’une issue C’est comme les fesses un jour ou l’autre tu t’assois dessus Certes, l’oppresseur a la loi, l’oppressé la foi Et quand la foi affronte la loi elle laisse très peu d’choix Reggae, gospel, jazz, blues, hip-hop Autant de mouvements qui prêchent dans la rue comme sous les stroboscopes L’argent peut être un ennemi Mais y a pas pire qu’un traître en famille des causes pour lesquelles on agit Son, plus profond que le son lui-même Il s’agit d’bouger d’ici, men, de fuir le système comme D’échapper au flair d’un contrôleur, trouver sa planque Issu des sous-sols, mon rap à moi n’est pas à vendre Donc, le train redémarre Stupéfait de voir le nombre d’MC descendus à cette gare J’ai vu, j’ai lu, j’ai su, j’ai entendu mon rap de rue, j’y ai cru Et j’continue [Pont (*2)] J’suis en route vers Sion Comme ce diamant sur un vinyle, je verrai bien la fin du sillon La fin de ma mission, malgré la pression l’oppression La pression l’oppression (rude boy) [Couplet 3] Troisième arrêt, on dit qu’le rap marche, ça c’est vrai On s’l’arrache, tout l’monde en veut, l’industrie produit de l’or On l’forge pour en faire un veau C’est la gare du luxe On y respire et descends tous comme pour un terminus On y récolte le fruit de nos efforts et passions C’est comme Sion, mais ce n’est pas Sion Sion c’est loin, la paix c’est loin, la libre expression loin La France est loin De tolérer c’que j’fus, moi L’abolition des lois racistes, l’égalité, l’annulation d’la dette des ex-colonies Qu’on a pillées, loin Après réflexion j’réembarque Avec l’étendard qu’ils ont qualifié de hardcore Hardcore, c’est seulement un style Mais à quoi sert un colosse à la tête d’or s’il a des pieds d’argile Tu vois, pour moi c’est ça l’rap Faire d’la musique pour un éveil communautaire pour moi c’est ça l’rap [Interlude] Attention, voie 3, ce train est sans arrêt Veuillez vous éloigner de la bordure du quai s’il vous plaît [Refrain] [Interlude] La compagnie des chemins de fer vous souhaite un agréable voyage