Le Réverbère

Du haut de la canopée de béton j'suis d'humeur clair-obscur Quand dans ma lueur éclate le sang de vos bavures Mon halo lumineux met en lumière toutes vos hontes Pendant que la sueur sociale s'accumule à ma base A genoux, une mère pleure, un sac de course l'anse rompue Comme si c'était le signe d'un destin déchu De l'aurore à l'aube, j'éclaire sans jamais vaciller Pour mettre en luminescence vos vies sordides Un soir, j'entendis même des S.O.S stressés Les cris d'une fille que l'on salissait près du bloc C Tout le monde s'en moque, c'est devenu si commun Que la crasse de vos âmes peut même masquer votre chagrin Sous mon œil de lumière Sous mon œil de lumière Au-dessus de vos corps sans vie, j'inhale les vapeurs de souffrance Mais quand j'y pense, j'sais pas si j'en ai encore envie Hier, j'ai éclairé un chien s'faire débiter Après avoir été donné en pâture à trois pitts, et Quand la pluie se mit à tomber, le SDF du Square Pagnol Su que la carcasse accrochée était son ex-compagnon J'étais devenu autel de sacrifice Totem du mal, où se défoulent les fils de putes et leurs vices Planté sur l'épicentre du tourment Je ne sers plus, ne rassure plus, ou rarement Alors plutôt que de voir le sol et ses désastres Parfois j'aimerais tourner la tête pour contempler les astres Sous mon œil de lumière Sous mon œil de lumière Sous mon œil de lumière, j'ai la vision trouble A cause de vos parjures et autres substituts de vie Noyé dans vos brumes, je ne suis qu'un cierge Pendant qu'vous vous débattez comme des carpes sur une berge J'ai même éclairé des cavaliers de l'apocalypse en BMV Faire commerce de mort derrière leurs vitres teintées Éreinté de voir sans pouvoir Miné du haut de ma cime, je m'affaiblis en silence Mais là, en-dessous je revis la jeune mère et ses mioches Décidée à tout plaquer sans un regret en poche Marre d'être rouée de coups elle se voûte sous ma lueur Certains la diront lâche, moi je m'éteins pour lui faire honneur